J’ai dessiné comme une fuite du temps, comme une fuite des relations, dans une parenthèse dans le monde que je vivais jeune. J’ai dessiné jusqu’à mes 18 ans, souvent, régulièrement, quotidiennement, des croquis ici et là… par obligation psychologique, cela venait tout seul ou plutôt, je me sentais dans la nécessité de dessiner pour parler de moi. Peu d’écoute réelle, de présence active et désintéressée, m’amenait vers une confidence par le papier et le crayon à ma façon : juste pour me raconter mes émotions… avant de pouvoir me raconter ma vie.
C’est bizarre de constater que l’envie de retrouver les gestes est là et que je n’arrive pas à l’application. Alors, pour ne pas perdre de temps, je regarde, lis, découvre des outils, des philosophies de l’encre. Ma maman m’avait créé des calames et des spatules, loin de suivre la technique de taille traditionnelle, elle m’a tout de même proposé des outils très suffisants pour l’utilisation que j’en ai. Et Maijo m’a offert une pochette de rangement, vous vous en souvenez …
« Comme le pêcheur prépare sa ligne, le calligraphe, nous dit Lassaâd METOUI, taille le roseau souple et tendre. Avec la même précision, il fixe la longueur de son calame : un empan, la plus grande ouverture de la main, entre pouce et petit doigt. Avec la même minutie, il sculpte le corps de l’outil, pas plus gros que le majeur. Avec le même soin, il affine le bec, droit ou oblique, et ajuste les lèvres d’où jailliront les pleins. Douces lèvres du calame qui savent embrasser le papier, avec tendresse et fermeté, au gré des impulsions des doigts. Pression à gauche, pression à droite, le bec fait une douce moue : surtout ne pas blesser la lettre… »
Et oui derrière un maniement quasi ludique, une calligraphie arabe se dévoile peu à peu. Et l’atelier en plein air, dans le sable, du calligraphe Lassaâd METOUI m’émerveille.
*source
Après la taille, la marche dans le vent et le sable, une pochette à calames sur l’épaule, il s’arrête et les genoux à terre sans autre façon (un tapis enveloppant le matériel loin des tables de travail) calligraphie en multipliant les styles, en brassant les cultures, en laissant aller son regard.
*source photo Sylvie DURAND (n’hésitez pas à aller sur son site, vous entrerez dans des ateliers enchanteurs)
« Le tracé, ce contour à peine dilué par la présence des choses, cette entaille qui prend parfois le voile de l’empreinte, et qui continue sa route comme le faisait naguère le sillage des caravanes. C’est à cet écho sans fin, à cet élan, sans aveu ni repentir, à cette métaphore qui fait chaque page une journée nouvelle, que Lassaâd METOUI a recours lorsqu’il veut définir la danse de ses lettres. »
(extraits de « Le jardin des mots » de Valérie-Marie MARCHAND et Sylvie DURAND que je ne peux que recommander chaudement à tous les amoureux de la calligraphie, de l’encre sous toutes ses formes, du brassage culturel derrière l’écriture des mots)
Vivre nous effraie, aimer nous rassure. S’il le fallait, notre ombre témoignerait pour nous. (A. Boudet)
*source calligraphie
9 commentaires:
laisse venir...et comme me disais mes profs de dessin, pense à créer pour ta poubelle, ça permet de lâcher du leste!
Dessiner les mots... Tout un programme en effet. : )Livrer ton histoire avec la calligraphie, tes découvertes récentes et passées : ))
VGM: créer pour ma poubelle... oui, oui, j'y pense (et puis j'oublie)
Lysalys: oui une bien belle idée n'est-ce pas?
Quel livre extraordinaire""La passagère du silence"!
Dans mon école de peinture, on travaillait à l'eau sur une toile cirée et on effaçait le lendemain matin les exercices du soir, ça donne une impression incroyable de recherche pure, de travail pour le travail, à la poursuite du bon geste et d'étrange gratuité, ce qu'on a peint ne reste pas mais on l'a acquis.
J'ai toujours aimé la calligraphie et regardé l'artiste exercer son art m'émeut. Par contre, je me sens incapable de maitriser ou non le calame et son encre... Sûrement un manque de confiance en moi et l'impossibilité manifeste du laisser prise!
ca donne envie de s' y mettre !
Bridget: avoir l'acquis... qu'est-ce que je t'envie! Oui un bien beau livre que celui de VERDIER dont il faut que je parle encore et encore...
Caroline: le calame ne contient pas beaucoup d'encre par rapport au pinceau et c'est vrai que j'ai aussi du mal mais j'ai dû en faire un peu (obligation maternelle oblige, et tant mieux!).
Mamzelle yaya: y a plus qu'à ;))
Hélas, ce n'est pas définitif! J'ai oublié plein de trucs!
mais acquis d'autres mais tout cela est fragile, en fait!
Bridget: la main a acquis et elle ne redemande qu'à reprendre son cour...et puis oui tu as appris d'autres choses!
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