vendredi 26 juin 2009

Un ruban rose de paroles

Par un concours de circonstance (et une invitation), j’ai participé à la journée d’échanges sur la plateforme de paroles Parle avec elles, autour du cancer du sein . La journée était ouverte aux femmes atteintes inscrites sur la plateforme, aux professionnels de santé (invités mais absents), à l’entourage (ici représenté par un mari et une amie d’enfance), aux associations d’aide (représentées par deux membres dont une malade), à quelques bloggeurs relayeurs d’information et si possible influents et aux capitaines du navire (Sophie Kune, dont le blog Femmes avant tout en partenariat avec Roche a été le premier pas vers la plate-forme, un premier pas cosmétologique et les accompagnateurs dont Cécile et Véronique).
J’y allais avec l’idée qu’il nous fallait être, en tant que porte ouverte sur les autres par les blogs, des relais, des prolongations, des ouvreurs de voies possibles. Je souhaitais aussi mieux connaître cette maladie, mieux appréhender aussi ce courage des « résistantes ».



La maladie n’a pas été étalée mais est restée en suspend, dans les réflexions sur le dialogue avec l’entourage, la famille, avec les professionnels de santé (un vrai challenge) ou le travail. La difficulté à se dire, à parler de la maladie. Rester discret, interdire le dialogue par peur ou ouvrir la parole… la plate-forme avait justement ce but : offrir un nouvel espace de parole, pas familial, pas conventionnel avec des professionnels mais bien de malade à malade (ou non), avec cet aspect tout de même feutré de l’internet, d’un lieu cosy et de l’anonymat (conservé ou non). Rompre avec l’isolement des malades et de l’entourage.
La maladie est alors posée de côté pour passer sur du concret : de l’alimentation, de la cosmétologie, des alternatives de bien-être en complément de l’allopathie lourde… et à venir de l’intimité.
Les difficultés annexes ont été entraperçues : la perte de revenu, la difficulté d’accession à la propriété, à l’emprunt… quand aux thèmes forts, une journée, et la présence d’autres (nous les non-malades) a peut-être limité les échanges. Comme elles nous l’ont dit, nous n’avons jamais le bon ton. Mais même notre maladresse, si elle est empathique, de solidarité et de compréhension, est aussi une porte ouverte vers les autres, vers autre chose que la maladie parce que les malades sont surtout des femmes et non des cancéreuses.

*source « oser en parler en Chine » (lire aussi le billet)

La plate-forme a donc toute son utilité, de mettre sur un pied d’égalité, de proposer des échanges d’émotions, d’informations, avec le risque d’être « éponge » un temps, d’être aussi dynamiseur à un autre moment. C’est aussi cela l’internet de ce mode opératoire de dialogue : l’action d’écrire permet de se dire, d’élaborer une parole, la réponse, les commentaires sont là comme accusé réception d’une présence comme aussi autant de moments de partage.
De quoi souhaiter une pérennité à cette plate-forme (et à toutes les autres) permettant de relier les gens ensemble et de trouver, par d’autres voies, des informations pour mieux vivre un quotidien en dehors du convenu.

*source

Mais moi dans tout cela. Et bien voilà, maladroite, naïve, sensibilisée et déboussolée aussi. J’avais envie d’être présente pour être prévenue, ne pas me limiter à une connaissance de mes seins et aux peurs que les tests cliniques peuvent m’avoir donné, de choisir aussi une certaine sagesse de vie (car nous prenons vraiment une leçon de vie). J’avais envie de savoir comment l’on se reconstruit femme… je me suis sentie hors de propos. Rajout du 27/06/09: un extrait de livre pour cette rage de la malade chez Erell .

9 commentaires:

mamzelle yaya a dit…

merci pour cet article qui me touche!

Lily a dit…

Vanessa, tu n'étais pas hors de propos du tout, et ton billet en témoigne. Il ne nous était pas facile de prendre à part à cette réunion (bouleversante) puisque nous n'étions pas nous mêmes touchées par cette maladie. Difficile de trouver les mots justes et de ne pas être "à côté" quand on ne cotoie pas la maladie tous les jours, qu'on ne la vit pas de l'intérieur. Mais tu les a trouvés ces mots justes, Vanessa, ton billet est une belle "porte ouverte" sur les autres...

erell a dit…

oh, merci Vanessa d'être venue commenter mon billet, qui est un extrait d'un formidable livre écrit par une psychanalyste ("Une chambre à part" de Catherine Ternynck).
Moi-même, je ne suis pas encore malade, mais je fais partie des rares familles où se transmet un gène qui prédispose aux cancers hormonaux (seins, ovaires, et prostate chez les hommes). J'ai une chance sur deux d'avoir hérité du gène qui a rendu ma mère malade, mais on ne peut pas encore le rechercher chez moi. Or si je suis porteuse du gène, j'ai un risque de 80% de développer la maladie.
J'ai très longtemps fait l'autruche, et puis cette année j'ai enfin accepté le suivi annuel prescrit par les généticiens de Curie. J'ai découvert le texte qui figure ds mon billet, à peine quelques jours avant de subir ma première IRM. Et je dois dire que la lecture de ce texte m'a amenée à me représenter à quels émotions débordantes j'étais susceptibles d'être confrontée dans les prochaines années. Il se trouve que mon sein gauche n'est pas tout à fait normal, mais que pour le moment les examens n'engagent pas à l'escalade (on se contente de surveiller). Et bien, ce sein qui m'a donné tant de plaisirs, ce sein qui a nourri mes trois enfants (et pour la petite dernière, l'ultime tétée a eu lieu en mars), ce sein je ne pourrai m'en séparer sans éprouver un sentiment d'arrachement irréparable d'une des plus intime et des plus riches sources de mon corps.
Je te remercie fort de ton billet car il m'a permis de découvrir un blog et une plate-forme dont j'ignorais l'existence.

Zoridae a dit…

Mais non pourquoi hors de propos ? Ton billet est très beau et touche à l'essentiel...
Pour ma part, je pense sans cesse à cette journée !

VanessaV a dit…

Mamzelle yaya: de rien

Lily: maladroite sûrement ;) mais merci

Erell: alors il avait lieu d'être ce billet... pensée

Zoridae: bienvenue entre mes billets... maladroite parce que dans ces petits touts que sont la sexualité j'ai remis un contexte déplacé... mais tant pis, je ne me refais pas. Oui, une journée forte.

Véronique a dit…

Merci Vanessa pour cet article : tu en parles très bien, et on retrouve bien la richesse de cette journée et l'implication (très) personnelle qu'elle nous a demandé à tous.
Comme Lily et Zoridae, je ne trouve pas du tout que tu étais "hors de propos" : je pense au contraire que le fait d'être là, d'écouter et de réagir le plus naturellement possible est une preuve que tu ne poses pas, sur ces femmes, le regard trop "stéréotypé" qu'elles redoutent...
Merci pour ta présence et ta réflexion sur tout cela.
A très bientôt
Véronique

Cécile a dit…

Vanessa, ce billet est la preuve la plus évidente que tu n'es pas hors de propos. Sinon comment pourrais-tu avoir tant à dire sur le sujet ?

Je rejoins totalement l'avis de Véronique, tu rends parfaitement compte des échanges que l'on a eu et tu en rends compte avec ton regard et tes impressions ce qui est juste LA richesse d'un blog.

Merci pour tout ;-)

Unknown a dit…

Bonjour à toutes et particulièrement à Vanessa qui n'était vraiment pas hors de propos.
Tu sais, j'ai mis du temps à te laisser un commentaire parce que moi aussi, je voulais ne pas être hors de propos et finalement, je me suis dit qu'à part être soi et c'est bien ce que tu as été, il n'y pas de propos ou de non propos.
Chacun est comme il est comme tu le dis si bien non?
En tous cas, merci de ta présence et ensuite merci beaucoup pour ton article magnifique et vraiment très émouvant.

VanessaV a dit…

Véronique: bienvenue entre mes billets! Merci d'y avoir vu de la "présence". Et merci encore pour cette invitation si investie et pertinente.

Cécile: oui au moins avec un blog je peux ne pas faire une ligne mais un peu plus, expliquer si besoin ai quand à l'oral je suis maladroite. ;)

Sophie: bienvenue entre mes billets! Etre soi... alors c'est bon je l'ai été. Merci de laisser aussi la parole aux non-malades, cela m'a énormément apporté.