Pour une partie de ma famille, me lire une histoire tous les soirs était important. A l’âge de la puberté (ou est-ce au moment où j’ai pu lire seule ?), ce plaisir ne m’était plus proposé. Quels sont les détenteurs de cette loi idiote qui interdit ce don de partage entre les parents (ou personnes maternantes) et les enfants, adolescents ?
Le plaisir de suivre seule la lecture, de s’immerger dans une histoire inconnue (ou connue sur les bouts des lignes) n’est pas le même que celui d’une voix douce (ou caverneuse), chaleureuse, qui nous emmène au pays des songes et avec qui nous partageons des émotions.
Mon imaginaire de jeune fille a été bercé par les illustrations de Gyo FUJIKAWA. J’avais adoré ces enfants de toutes les couleurs courant dans les prés, ce bébé noir couché dans son hamac suspendu sur une branche de saule pleureur pris au vent, ces enfants se tenant la main ou collés les uns contre les autres pour écouter une histoire.
Un de mes livres préférés vers 5 ans était « Le petit indien » de Charlotte ZOLOTOW, avec les illustrations de Leonard WEISGARD. De merveilleux souvenirs…
J’aime lire à haute voix, pour les adultes…
Jusqu’à très récemment, je n’avais pas eu d’expérience avec les enfants. Oui j’ai fait du baby-sitting, j’ai même été fille au paire (tout cela avant 17 ans). Pendant ces périodes, je n’étais déjà plus insouciante. Quand est-ce que je l’ai perdue, cette richesse de l’enfance ? A 7 ou 8 ans je pense… J’arrivais encore à parler aux enfants, à les considérer. Après, mes utopies de vie se sont écroulées, l’aigreur de la vie est arrivée et avec elle un malaise complet en présence d’un marmot. Comment pouvais-je donner de moi quand j’attendais tellement des autres ou de la vie. Il n’y a pas si longtemps que leur présence ne m’effraie plus…un an avant la naissance de notre merveille à peu près. Cela tombait bien…
Maintenant j’attends avec impatience ces moments intenses de ressourcement différent. Offrir à notre bout de chou notre imaginaire et l’aider à créer le sien. Lui offrir une voix, un moment quotidien de détente, une proposition aux songes…à l’initiative (peut-être continueras-t’il la phrase commencée pour laisser ses accompagnants de lecture reprendre la lecture quand il sera fatigué ou trop pris dans l’histoire ou l’émotion), à la créativité (mes premiers dessins étaient l’illustration de mes rêves…) ou tout simplement à la confiance d’être aimé et entouré.
Bon, notre petit loup n’est pas en attente de la voix de sa mère : je lui lis déjà des contes et des nouvelles (qui ne sont pas de son âge), j’aime lire en prenant une pause pour le regarder, savoir s’il est pris dans le cocoon de ma voix…et, comment vous dire, je suis sûr que pendant ces moments-là il est bien. Mais il va falloir que je choisisse d’autres lectures : d’autres contes que ceux de Henri GOUGAUD, de Jacques PREVERT, de Rudyard KIPLING, de Jean-Jacques SEMPE, de Roald DAHL ou de Pierre GRIPARI (pour les reprendre un peu plus tard) ; d’autres nouvelles que celles de Milan KUNDERA ou de Dorothy PARKER (beaucoup plus tard…quand l’insouciance ne sera plus un don mais un acquis).
Le plus important n’est-ce pas la voix, Coumarine, et la lecture à voix haute, Miss fenêtre sur la cour ? N’hésitez pas à aller lire leurs superbes billets qui m’ont donné envie de dévoiler mes prises de voix.
* rajout du 12/04/06: une "soeur de pensée" m'a dirigée vers d'autres billets en relation avec celui-ci. Quelle belle idée... Clarabel nous invite dans les lectures d'une femme à ses filles et ses retours vers son prôpre imaginaire et Lali nous illustre ce don de l'envie de lire...
15 commentaires:
Dés leur naissance j'ai lu des livres à mes filles. Je continue encore et je le fais même aux enfants de mon village. Parce que ces lectures sont des moments privilégiés. Des moments de partage. J'aime beaucoup. Il y a peu nous sommes allées écouter une lecture publique, ce fut un vrai moment de bonheur. Je suis pour la lecture à voix haute.
Je connais Coumarine et Caroline. J'aime leur blog.
merci Vanessa; et le premier plaisir que tu vas avoir est celui de choisir en librairie, les couvertures, le texte, les mots, surtout les illustrations et ensuite de choisir LE livre au soir venu et enfin de partager avec lui l'histoire... des années de bonheur en perspectives.
J'aime lorsqu'il y a communion dans l'écrit comme tu l'as fait là.
Il y a aussi cet extrait de livre présenté par Clarabel, si je peux me permettre.
http://blogclarabel.canalblog.com/archives/2007/04/07/4545960.html#comments
Tout ceci fait boule de neige...
Je trouvais justement que Kirsty Gunn dans son livre "44" se penchait avec vérité sur ce beau moment de l'histoire au moment du coucher, sur ce partage et les souvenirs qu'ils réveillaient... Le chapitre entier vaut le coup d'oeil, je n'ai mis qu'un extrait (très frustrant, d'ailleurs !).
Ce que tu dis sur la lecture à voix haute est vrai, Vanessa. C'est indispensable de consacrer un moment de sa journée à lire, avec son enfant ou pas, et d'entendre l'écho de ces mots qui flottent au-dessus de nos têtes ! Parfois cela donne un sens complètement différent à nos lectures ! :)
ah oui! j'aime ce billet! Il me parle beaucoup (tu as lu que j'utilise le mot: PARLE)
Important de lire des histoires à ses enfants, parfois ce sont des histoires sans cesse répétées, qu'ils aiment et redemandent.
C'est de cette fçon que j'ai donné le goût de la lecture à mes enfants.
Je ne veux pas briser ici mon anonymat, mais j'ai écrit et interprété trois lectures-spectacles...c'est fabuleux d'accrocher le regard de ceux qui vous écoutent, j'aime, c'est ma vie.
Je suis contente de t'avoir découverte, merci
(et j'aime aussi bcp Bellesahi et Caroline...les grands esprits se rencontrent (oups!!!)
Il a de la chance ton petit bout d'homme d'avoir une maman qui l'éveille aux belles choses
Pfff, mon commentaire précédent a été avalé...
Comme tu as raison, Vanessa, de lire des histoires à haute voix, je souhaiterais que tous les enfants puissent connaitre ce moment d'intimité le soir avec un de leur parents. Je pense que les histoires que nous lisait mon père a dù beaucoup jouer sur mon imagination, et ont aidé à forger mon caractère...
euh! c'est encore moi et j'ai trouvé un billet de Lali:
http://lali.toutsimplement.be/?p=1032#comments
si tu me le permets, Vanessa.
C'est drôle que la lecture de l'enfance nous touche à ce point...
Bellesahi: oui ce sont de formidables moments de partage...et j'aime et pour les enfants et pour les adultes...
Caroline: tes propositions de lecture me plaisent énormément... du partage encore du partage, avec un don de sens...je suis comblée et je vais de ce pas les rajouter à mon texte original.
Oui je commence déjà à fouiner sur les étalages jeunesse mais quelle lecture choisir pour quel âge...
Clarabel: je lis pourtant ton blog régulièrement, comment ai-je pu passer à côté de ce superbe texte.
Oui, j'aime le rythme différent de la lecture à voix haute, l'intonation, les pauses... le don de soi offert avec tout ce que cela comprend.
Coumarine:j'étais sûr de ton penchant sur la lecture à voix haute, cela se sentait... J'ai aussi toujours trouvé que lire à voix haute des textes, des histoires, qui ne sont pas que le reflet de nos vies, apporte en fait énormément à ceux qui recoivent la parole, le silence, les mots... de la reconnaissance, du partage, de la joie d'être ensemble (vraiment).
Marraine: oui, le peu d'histoires lues m'ont donné la clef de ma soupape de sécurité à l'adolescence (en plus d'une envie irrépréscible de lire)... les lectures doivent effectivement accompagner notre développement et peut-être créer notre imaginaire. Au fait, féliciations pour ta boutique en ligne!!
C'est Le moment de la journée!!! et à 10 ans Mr Bouch' n'a pas l'intention de s'en priver!!!
Lamousmé: comme je le comprend...une lecture de Harry Potter ensemble cela doit être fabuleux!!
Tu es magnifique, Vanessa.
J'aime à la folie ce billet.
Mon mari me fait la lecture tous les soirs. Je trouve que c'est quelque chose de magique que d'offrir sa voix à l'autre.
Qu'est-ce qui t'a permis de pouvoir, un an avant la naissance de ton enfant,à nouveau te sentir bien face à un enfant ?
Holly golghtly: ce billet a, semble-t'il, une résonnance pour tous ceux qui ont été bercés dans leur enfance de cette manière ou tous ceux qui en ont manqué...
Pour ma part, c'est moi qui lit à mon ami (non lecteur, au comble, mais amoureux des belles lettres, choisisseur formidable de livres). Je lui lit des réflexions sur un thème qui lui est cher, une belle histoire, une fin tragique, une critique acerbe..etc. J'adore. Je comble mon manque de voix par le don de la mienne!
Quand à la possibilité d'"être" en présence des enfants...c'est très intime et je te mailerais rien qu'à toi la réponse complète. Juste quelques petits éléments: un ami, père avant que je sois mère, me disait de ne pas culpabiliser, que les enfants, comme moi, étions fragiles et à apprivoiser (comme le renard du petit prince). Je n'avais pas besoin de chercher à être une autre et juste les considérer étant et en devenir.... Et que l'enfant, qui n'attend rien de moi, viendrait à moi...après quelques temps, le premier est venu voir l'étrangère que j'étais et m'a fait confiance trois minutes...puis le deuxième...mais ce n'est pas pour cela que la fibre maternante est là pour les enfants des autres (à part ceux des êtres chers car eux aussi sont devenus précieux!).
De par mon métier, je lis beaucoup à haute voix: mes petits élèves ne savent pas encore lire.
Chez moi, quand un pssage me plaît énormément, me touche profondément, je ne peux résister à l'envie de le partager avec mon cher et tendre. Alors, à haute voix, le passage en question s'amplifie et prend une autre dimension...sublime.
Lorsque je serai mère à mon tour, je sais que je lirai à haute voix de multiples histoires car je suis convaincue que les mots dits à haute voix ont une vie encore plus riche et plus belle que lorsqu'on les garde pour soi.
Katell: Oh comme tu as raison, ils prennent une amplitude et un sens encore plus intense. Je suis persuadée aussi qu'entre les lignes nous transmettons de l'amour...
Merci, Vanessa, pour ta générosité. Je suis troublée de trouver chez une autre des idées et des questions, voire des réponses, qui me sont très intimes.
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